Professionnels de la durabilité : soyons perçus comme un centre de profit plutôt qu’un centre de coûts !
Dans la conjoncture économique, politique et géopolitique actuelle, nous sommes de nombreux professionnels de la durabilité à pouvoir témoigner des difficultés rencontrées lorsqu’il s’agit d’engager les décideurs internes (CEO, comex, codir, …) et externes (clients, prospects).
Et si cette difficulté était en fait l’opportunité de se réinventer ? La solution consisterait-elle à s’intéresser aux enjeux financiers et business des décideurs plutôt que leur demander de s’intéresser à la durabilité ? Faire nous-mêmes un pas vers les enjeux financiers augmente forcément la probabilité de se rencontrer. Par extension, nous pouvons même devenir apporteurs de solutions financières et business à nos décideurs internes et externes.
De quoi avons-nous besoin afin d’opérer un tel pivot de posture ?
Accepter la règle du jeu : la durabilité ne peut ignorer les moteurs financiers
Premièrement, il est nécessaire de prendre conscience et d’accepter le constat suivant : que nous le voulions ou pas, l’argent, le pognon, le fric, la galette, la thune, le pèze, le flouse, le grisbi, la carbure, la douille, les pépettes, le trèfle, le foin, l’oseille et le blé (merci la nature pour les quatre derniers !) sont et resteront le moteur premier qui motive les entreprises et leurs dirigeants.
Rappelons par ailleurs que l’argent et la profitabilité ne sont pas des « gros mots » mais plutôt des conditions nécessaires à la pérennité du tissu économique. Le problème est plutôt dans l’usage qui est fait de cet argent.
Renforcer notre posture avec la finances d’entreprises comme levier d’influence
Deuxièmement, quelques connaissances en finance d’entreprises et quelques outils peuvent aider à être un cheval de Troie (ou une Amazone !) auprès des décideurs.
Les risques climatiques sont avant tout des risques financiers
Tout d’abord, les risques climatiques, physiques et de transition, sont avant tout des risques financiers. En effet, en cas de survenance, leurs conséquences se traduisent dans le chiffre d’affaires, les charges d’exploitation, les charges d’amortissements, la valorisation des actifs, les flux de trésorerie, etc etc.
Il est possible de considérer ces effets financiers comme un point de départ, et non pas comme un point d’arrivée. Concrètement, cela signifie que nous dressons l’inventaire des principales problématiques financières et business des décideurs et nous y associons une solution qui relève de la durabilité.
Les solutions que nous apportons contribuent à nous positionner en tant que « business partner » et nous cessons progressivement d’être perçus comme des « empêcheurs de tourner en rond » !
Associer chaque problème business et financier à une solution durable
Prenons un exemple très répandu. Il s’agit d’une entreprise qui rencontre une contraction de sa profitabilité liée au renchérissement du coût des matières premières. Lors d’une réunion, le CEO sollicite ses équipes, en particulier le Directeur des Opérations (DOP) et la Directrice Financière (DAF), concernant l’élaboration d’actions correctives. Il n’a pas pensé à nous inclure puisqu’il nous perçoit comme un centre de coût et non pas comme un centre de profit !
Néanmoins, nous décidons d’être proactifs, nous allons voir la DAF et le DOP et nous leur présentons nos propositions en prenant soin de démontrer les liens de causes à effets entre nos propositions et les effets financiers attendus. Et là, un petit miracle commence à s’opérer : nous commençons à être mieux écoutés et nous sentons que notre positionnement évolue.
Se former sur les liens entre durabilité et performance financière
Après plusieurs étapes, le CEO nous demande une présentation de notre projet d’éco-conception auprès du codir et surtout la quantification en euros du retour sur investissement (ROI) du projet. Nous ne sommes pas du tout à l’aise avec le calcul du ROI.
Malgré l’aide qui peut être apportée par nos collègues du contrôle de gestion et par les ingénieurs de la Direction des Opérations, nous identifions clairement le besoin d’être formés sur les liens entre durabilité et performance financière. Nous nous souvenons qu’il existe une telle formation auprès d’Ecolearn et FDE Solutions.
Quand la perception de la durabilité pivote de centre de coûts à business partner
Une légitimité renforcée au sein du CODIR
Ce projet d’éco-conception est finalement validé par le CEO. Ce projet contribue également à renforcer la confiance des banques partenaires puisque l’entreprise limite son exposition à l’augmentation du coût des matières premières. La perception de la fonction en charge de la durabilité a totalement évolué. Nous sommes plus intégrés dans différentes réunions transversales. Les budgets de l’équipe sont légèrement augmentés car de nouveaux projets vont être lancés.
Non, nous n’avons pas vendu notre âme au dieu argent
Avons-nous vendu notre âme au « dieu argent » ? Absolument pas, nous avons privilégié l’efficacité pragmatique et nous avons permis à une entreprise de s’engager dans l’éco-conception. C’est uniquement l’angle d’approche qui a été adapté au contexte économique, politique et géo-politique.

